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Quelques notions plus techniques à l’usage des organistes

L’orgue à jouer toutes les musiques n’existe pas ! Les efforts qui tendent à rendre un instrument polyvalent aboutissent toujours à un résultat qui peut tout au plus être honorable dans beaucoup de littératures mais dont une tendance se dégage inévitablement parmi les autres. Au Chant d’Oiseau, le spectre des musiques qu’il est possible de jouer semble beaucoup plus étendu que celui des instruments de conception néo-classique. Ceci est dû au fait que chaque jeu individuellement a été travaillé pour donner à la fois de la rondeur et de la clarté. Néanmoins, le répertoire antérieur au dix-huitième siècle risque de poser des problèmes dans la mesure où les organistes orientés plus particulièrement vers ce répertoire sont en général très scrupuleux quant à l’authenticité de la reconstitution sur base des connaissances musicologiques actuelles. Dans une telle optique, seul le répertoire du vingtième siècle pourrait donner une réelle satisfaction. A l’inverse, les interprètes qui estiment que leur rôle consiste à recréer une oeuvre sous un éclairage plus personnel peuvent parfaitement exploiter tout le répertoire, J.S. Bach y compris, à condition de s’adapter à une nouvelle technique de registration et de faire table rase de tous les réflexes traditionnels en la matière. Toutefois, la musique française de la fin du dix-neuvième siècle à nos jours, reste le créneau privilégié pour lequel l’orgue donnera le meilleur de lui-même.

Un certain nombre de particularités des registres mérite incontestablement d’être mentionné :

Les fonds, bien qu’ils soient proportionnellement peu nombreux, prennent du fait de leurs tailles très larges beaucoup de place dans l’espace sonore. On a souvent tendance à « registrer gros » sans s’en apercevoir depuis la console. Le gemshorn du récit n’est pas un jeu gambé comme on s’y attend mais bien un principal très consistant. Par conséquent, l’unda maris perdra son effet ondulatoire en le mélangeant avec le précédent. Seul le bourdon fournira une association heureuse avec l’unda maris pouvant s’apparenter au « Schwebung ».

Les anches du positif ont essentiellement une fonction soliste. Leur intégration à des ensembles est à déconseiller. Par contre, un mélange extrêmement intéressant est obtenu entre la ranquette de 16′ et l’aliquot dont les résultantes correspondent. Au grand orgue, la trompette de 8′ est relativement douce tandis que le clairon 4′ – 16′ développe une puissance nettement supérieure. La division de ce dernier a été conçue de telle manière que la partie grave en 4′ corresponde à l’étendue du pédalier (do,-soli). Vient ensuite un intervalle intermédiaire en 8′ puis le dessus en 16′ à partir du do. Les autres anches ne réservent aucune surprise particulière et s’inscrivent dans la grande tradition symphonique française.

Les mixtures, elles, réservent des surprises dans la mesure où la plupart d’entre elles possèdent des résultantes graves. Ainsi, en s’épaississant vers l’aigu, le plein jeu progressif du récit atteint une résultante de 32′. De même, au grand orgue, la grosse mixture donne une résultante de 16′ mais contient également une grosse tierce. L’autre mixture est basée sur le 8′. L’aliquot IV est un sesquialter de 16′ prolongé d’une neuvième et d’une quinzième (sur base de do, sol, mi, ré3, si). La cymbale est très aigüe (4′). Le théorbe III contient une tierce, une septième et une neuvième; sa résultante est de 32′. De même que le plein jeu progressif, il ne s’intégrera que dans de grands ensembles sauf pour l’obtention d’effets spéciaux. L’aliquot, lui, ne servira que pour de semblables effets. Les cornets descendent jusqu’au do grave en perdant toutefois leurs premiers rangs. Il est à remarquer que les combinaisons entre les divers rangs du cornet harmonique (solo) permettent d’obtenir des changements de timbre étonnants.

Le principe qui consiste à considérer chaque clavier comme une unité indépendante est totalement inapplicable au Chant d’Oiseau. Vu l’étalement de ses 46 jeux sur cinq claviers (en comptant le pédalier), l’utilisation intensive des accouplements est d’une importance capitale.

Cette composition permet ainsi une combinatoire beaucoup plus élevée d’opposition de timbres mais complique énormément la recherche d’ensembles homogènes, spécialement dans la littérature baroque dont les principes de registration sont contradictoires. Il est pourtant parfaitement possible d’obtenir un équilibre sans la traditionnelle construction pyramidale 8′, 4′, 2′, mixtures. La régistration n° 1 (p. 20-21) donne l’exemple d’un grand plenum basé sur le 16′. On peut aussi construire un plenum sur base du 8′ (n° 2) permettant un dialogue avec un second plan sonore (III) indépendant. Si on souhaite une pédale indépendante, on peut réserver le récit à cette tâche soit dans le cas d’une pédale ayant une simple fonction de basse (n° 3), soit dans le cas d’un cantus firmus (n° 4). Quelques registrations de trios (n° 5 et 6) et de chorals (n° 7 à 9) sont citées à titre d’exemple.

Dans la littérature des dix-neuvième et vingtième siècles, les problèmes sont beaucoup moins délicats. Pour la musique française, le demi grand choeur (n° 10) avec ses trois plans sonores GPR-PR-R peut être facilement obtenu grâce à l’accouplement solo-positif qui donnera a ce dernier toute la consistance nécessaire pour servir de plan intermédiaire entre le récit et le grand orgue. Pour constituer des ensembles de fonds très riches, il ne faut pas nécessairement accumuler trop de jeux. Les tailles sont tellement grandes que l’on atteint rapidement la saturation. Un ensemble de fonds doux (n° 11) ne tolère pas la grosse flûte ouverte de 16′ à la pédale, utilisable seulement à partir de registrations déjà très consistantes (n° 12).

Le schéma montre la disposition des différents sommiers à l’intérieur du buffet. La lecture permet de comprendre que la pédale, récit et le solo, qui ont tous trois une très forte présence dans l’église, sont relativement mal perçus depuis la console. Un minimum d’expérience vient rapidement à bout de cet inconvénient.

Les manuels s’étendent jusqu’au Do6 et le pédalier jusqu’au Sol3. La registration est commandée à partir de pistons électromagnétiques raccordés à un combinateur de 8 mémoires. Celles-ci sont accessibles soit manuellement sous le clavier de GO, soit avec le pied droit. Les commandes de tirasses sont également reprises aux pieds mais pas les accouplements entre manuels. L’annulateur agit sur le crescendo général (témoin allumé = annulateur en fonction). Les différentes étapes du crescendo général sont affichées au-dessus du clavier de solo par un indicateur numérique lumineux. Grâce au tableau de fiches situé dans un local technique à l’intérieur même de l’instrument, derrière la console, toute expérience de crescendo est possible. Les 60 fonctions disponibles sont câblées et peuvent être distribuées à volonté sur un tableau à 10 x 10 entrées : dix niveaux de crescendo pouvant recevoir chacun dix fonctions.

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